Le synaspismos est la coalition du mouvement, de la gauche et de l'Ecologie
L’insulte faite au peuple grec
La Grèce s’insurge contre le FMI. Les propos de Christine Lagarde rejetant la « complaisance » envers Athènes révoltent. La pétition lancée par l’Humanité est relayée par la presse hellénique.
Athènes (Grèce), envoyé spécial.
Àpeine six heures après que le premier ministre Georges Papandréou (Pasok, social-démocrate) a annoncé son intention de recourir au plan de soutien UE-FMI, six mille personnes ont manifesté vendredi à Athènes. Une banderole disait tout haut ce que la majorité des Grecs pense tout bas : « IMF go home » (FMI dehors) Selon un sondage, 92 % d’entre eux sont convaincus que le recours au FMI entraînera de nouvelles mesures drastiques et 65 % pensent qu’il va influencer négativement sur leur vie.
« C’est un jour sombre pour la Grèce et pour l’Europe », constate Alexandros Konstantinou, jeune du parti de gauche Synaspismos. Sombre car l’appel au plan décidé le 25 mars à Bruxelles a une conséquence immédiate : « Les politiques classiques du FMI (réduction des dépenses publiques, baisse des salaires…) sont dorénavant inscrites et légitimées dans le cadre européen », comme le souligne l’économiste Yannis Dragassakis (1).
Certes, en Europe, le discours sur la solidarité est de mise. Ainsi, Christine Lagarde, la ministre française de l’Économie, a-t-elle déclaré au JDD : « Lorsqu’une partie du territoire (européen) est attaquée et que notre devise commune est sous pression, on est tous tenus d’être solidaires », avant de préciser que « cela ne veut pas dire qu’il faille être complaisant » (lire l’apostrophe ci-dessous).
« Les conséquences seront graves »
« Complaisant ». Les Grecs apprécieront. Les taux appliqués à leur pays ont atteint les 9 %. Avec le plan de soutien, ils pourraient « tomber » à environ 5 %, quand les États prêteurs emprunteront eux-mêmes à un taux bien inférieur. Dans ce cadre, la pétition lancée par l’Humanité suscite un fort intérêt. Quant au prêt du FMI, il sera accompagné d’une dose de réformes. « Je crois que nous vivons un moment historique. La Grèce est le premier pays européen de la zone euro où le FMI pose son pied, s’inquiète Yannis Skalidatis, enseignant de trente-deux ans. Les conséquences seront graves. Je crains des licenciements dans l’enseignement public. »
Crainte justifiée. Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a conditionné l’aide de son pays : elle « dépend entièrement de savoir si la Grèce va poursuivre dans les années qui viennent la stricte politique d’économies qu’elle a engagée. J’ai été très clair avec le ministre grec des Finances », a-t-il expliqué dans le Bild, avant des élections régionales où la CDU, au pouvoir, pourrait voir son score chuter. La solidarité a ses limites.
Pendant ce temps, la Grèce s’enfonce dans la crise. Le déficit public a été revu à la hausse, « à cause d’une baisse du PIB grec, c’est-à-dire une baisse de la production », précise Yannis Dragassakis. Le taux de chômage augmente (11,3 % en janvier 2010, contre 10,2 % en décembre 2009). L’inflation, qui mesure la hausse des prix, est la plus haute de la zone euro (3,4 % entre février et mars). Mais les options politiques et économiques européennes restent les mêmes : le libéralisme avant tout
Fabien Perrier
(1) L’entretien est disponible sur le site de l’Humanité (www.humanite.fr) Des radios, des chaînes de télévision s’intéressent à la « pétition de l’Humanité en faveur du peuple grec ». Samedi, en première page, le quotidien I Avghi donnait largement la parole à Jean-Paul Piérot. Le lendemain, Patrick Le Hyaric était à la une, avec ce titre : « Nous avons besoin d’une monnaie commune mais pas d’une monnaie unique. » Le journal Epochie a publié un entretien avec Patrick Apel-Muller. Hier, plus de cinq cents signatures figuraient sur le site humanite.fr
l'Humanité du 26 avril