L’intransigeance du gouvernement n’a pas découragé le mouvement social. Bien au contraire ! Celui de Nicolas Srkozy devra revoir son attitude, à l’issue d’une journée de mobilisation sans précédent depuis l’élection du chef de l’Etat.
La marée monte, la colère gronde. Toute la journée, mails et coups de téléphone ont afflué à la rédaction de l’Humanité. « Bien mieux, plus nombreux que le 29 janvier » de Bretagne ou d’Auvergne, du Nord à Saint-Denis de la Réunion, le même constat, la même mesure. La mobilisation populaire, loin de s’épuiser face un président et un gouvernement lui opposant morgue et mépris affiché, s’est renforcée, s’est élargie à de nouveaux secteurs sociaux professionnels.
Les chiffres s’égrènent. Tous confirment la même tendance. Dans la matinée, la manifestation marseillaise établit un record : la barre des trois cent mille manifestants est franchie. Plus au nord, Grenoble affiche 60 000 manifestants, dans l’après-midi d’autres chiffres record s’alignent 75 000 à Nantes, 50 000 au Mans….. Dans la capitale, 350.000 Franciliens envahissent l’espace entre la République et la Nation. Dans les états-majors syndicaux, les calculettes s’affolent, le cap des trois millions de manifestants est en vue… Il sera atteint.
Les travailleurs du privé ont bravé en plus grand nombre la pression patronale, donnant aux immenses cortèges des manifestations une tonalité nouvelle. Lors des grandes grèves de 1995, les cheminots étaient soutenus par tout le monde du travail, qui « faisait grève par procuration ». Ce phénomène s’est répété depuis à plusieurs reprises. Jeudi, au contraire, tout se passait comme si chacun tenait à prendre sa place dans le mouvement. C’est seulement à ce prix que les salariés pourront établir un rapport de force qui fasse reculer l’intransigeance du couple Sarkozy-Parisot. Il faut dire que les travailleurs du secteur privé sont durement frappés pour permettre de maintenir à flot, par temps de crise, la grosse part du gâteau aux actionnaires, de garantir le pactole de stock options des hauts dirigeants et les parachutes en or des patrons déchus.
Dans les rues de Compiègne, qui a connu sa plus puissante manifestation de mémoire de syndicaliste, les ouvriers de Continental ont été accueillis par une haie d’honneur. Victimes d’un chantage à l’emploi, qui les a conduits à subir une augmentation gratuite du temps de travail pendant deux ans, ils ont appris que leur patron, le groupe allemand Schaeffler va fermer l’usine pourtant bénéficiaire. Des millions de salariés se reconnaissent dans le combat des « Continental » dans la colère contre le scandale des licenciements « boursiers »
Ils sont descendus dans la rue, les ouvriers de Caterpillar, de la région grenobloise, que cette société multinationale (production d’engins de chantier) veut liquider. Ceux de Rhodia, de Sanofi, les travailleurs de l’automobile, mais dans chaque rassemblement, dans les villes les plus modestes, où l’on a manifesté aussi en plus grand nombre, les banderoles des syndicats des entreprises locales côtoient celles des enseignants, des travailleurs de la santé. Et dans les rangs des manifestants, des hommes et des femmes participent à leur première manif, n’imaginaient même pas devoir un jour battre le pavé contre l’injustice sociale. Combien sont-ils ces primo-manifestants, clercs de notaires, secrétaires dans des PME qui, faute de disposer d’une force syndicale, ont posé des RTT pour aller manifester ? Les sondages indiquent, les uns après les autres, que la majorité des Français soutiennent les manifestations contre la politique du gouvernement et, pour beaucoup, sont prêts à y participer. Une tendance qui va crescendo, le dernier en date, de l’IFOP, estimait à la veille du 19 mars que la journée de mobilisation était soutenue par 78 % des Français. La journée de jeudi a confirmé cette évaluation.
L’unité syndicale, réaffirmée, a puissamment contribué à la dynamique. Ils se rencontrent dès vendredi à onze heures pour déterminer la suite du mouvement. Les responsables des confédérations auront analysé les réactions du gouvernement, dont l’intransigeance face aux revendications salariales n’a guère découragé le mouvement social, bien au contraire. Le soutien affirmé de la gauche affirmée dans un texte commun a aussi contribué à cette dynamique. Fait nouveau, ces manifestations ont été l’occasion d’une présence remarquée du Front de gauche crée à l’initiative du PCF et du Parti de Gauche.
Jean-Paul Piérot, site Huma
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